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Dictionnaire des monuments aux morts
Dictionnaire des monuments aux morts
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25 mai 2014

édifier un monument aux morts

Saint-Christophe-le-Jajolet construction
Saint-Christope-en-Jajolet (Orne),
construction du monument aux morts

 

 

les étapes de la réalisation d'un

monument aux morts

 

 

L'édification d'un monument aux morts réunit plusieurs protagonistes : civiques, politiques, religieux, associatifs, concepteurs, constructeurs.
Elle se déroule en plusieurs étapes. Le processus n'est pas toujours linéaire ni incontestable. Des différends surgissent sur le choix monumental, sur les symboles à retenir ou non, sur le coût de l'édifice, entre le conseil général et la commune... Des projets sont retenus puis abandonnés au profit d'autres.

1) la décision

Sollicitée par les milieux anciens combattants et mutilés, ou de sa propre initiative, l'instance qui prend la décision d'ériger un monument est le conseil municipal.

Aucune résolution législative ou gouvernementale ne le prescrivait. Les lois d'octobre 1919 envisageaient le commémoration et la glorification des héros de la guerre, sans mentionner de monument :

- la loi du 1er octobre 1919 (Journal Officiel du 3 octobre) imposait à chaque commune la mise au point d'un registre, fourni par l'État, inscrivant le nom "des militaires des armées de terre et de mer de la commune ayant pris part aux opérations de la campagne de 1914-1918". Ce document devait être nommé "Mémorial de la Grande Guerre 1914-1918" et déposé aux archives de la commune.

Cette opération ne fut quasiment pas menée. L'administration municipale s'occupait surtout des victimes, recevant les avis de décès provenant des autorités militaires ; ou du "pécule des militaires libérés ayant des enfants de moins de 16 ans légalement à leur charge lors de leur libération".

Saint-Chamond pécule 1919
Saint-Chamond (Loire), fiche de renseignement pour le pécule
aux militaires libérés (source : archives municipales, 5 Hsc 19)

 - la loi du 25 octobre 1919 annonçait que les noms des combattants morts pour la France seraient "inscrits sur des registres déposés au Panthéon", que chaque commune recevrait un livre d'or contenant ces noms. Ce livre d'or devrait être "déposé dans une des salles de la commune et tenu à la disposition des habitants de la commune".

L'article 5 de cette loi indiquait : "Des subventions seront accordées par l'État aux communes, en proportion de l'effort et des sacrifices qu'elles feront en vue de glorifier les héros morts pour la patrie", mais sans plus de précision.

Ainsi, la résolution d'édifier un monument fut bien un acte spontané d'origine locale.

18_juin_1919_A
La Chapelle-sous-Dun (Saône-et-Loire), délibération du conseil municipal
sur l'érection d'un monument commémoratif aux soldats morts pour la France, 18 juin 1919

(source)

 
C'est le conseil municipal qui passe contrat avec un sculpteur ou choisit un modèle de série présent sur le catalogue de grosses entreprises telles les Marbreries générales Gourdon à Paris ou les Fonderies du Val d'Osne. Lorsque des projets sont en concurrence, le choix est fréquemment le fait d'un jury constitué ad hoc.

C'est le conseil municipal qui traite, souvent de gré à gré, avec les entrepreneurs locaux en discutant les plans et les devis.

 

2) la souscription

Trois sources principales de financement existent : le budget municipal, la subvention du département et la souscription. Il existe parfois aussi des dons.

Parallèlement à l'action municipale, se met en place un "Comité pour le monument aux morts" pour recueillir plus largement les fonds nécessaires.

 

Pornichet_budget
Pornichet (Loire-Atlantique), moyens de financement du
monument aux morts, 1921 (source)

 

Beausoleil souscription
Beausoleil (Alpes-Maritimes), projet de monument aux morts
à élever par souscription, 14 juillet 1915

 

Beausoleil_photo_2010
Beausoleil, monument aux morts, 2010 (source)

 

08_mai_1921
La Chapelle-sous-Dun (Saône-et-Loire), délibération
du conseil municipal du 18 mai 1921
(source)

 

On trouve, dans les archives, des listes de souscripteurs.

Saint-Chamond souscriptions particulières (1)
Saint-Chamond (Loire), carnet des souscriptions particulières
pour le monument aux morts, 1921 (source : archives municipales, 1 Msc 26)

 

Saint-Chamond souscriptions particulières (2)
Saint-Chamond (Loire), carnet des souscriptions particulières
pour le monument aux morts, 1921 (source : archives municipales, 1 Msc 26)
versement des Aciéries de la Marine : 30 000 francs

 

Saint-Chamond souscriptions particulières (3)
Saint-Chamond (Loire), carnet des souscriptions particulières
pour le monument aux morts, 1921 (source : archives municipales, 1 Msc 26)
versement d'Augustin Neyrand : 1000 francs

 

 

 

3) l'élaboration

 

a) dessin d'architecte

 

Dijon projet
Dijon (Côte d'Or), projet de monument

 

Albi projet
Albi (Tarn), projet de monument

 

Lille maquette
Lille (Nord), projet de monument aux morts, maquette par
l'architecte Allemand et le sculpteur Éd. Boutry

 

lycée Agen maquette
Agen (Lot-et-Garonne), maquette du monument aux morts
élevé à la mémoire des anciens élèves du lycée

 

Saint-Aubin (Côte d'Or) projet
Saint-Aubin (Côte d'Or), projet du monument aux morts

 

Rhénanie Rhur maquette
maquette du monument aux morts de l'Armée française du Rhin,
cimetière militaire du Marxberg à Sarrebourg ;
projet de la Fédération des anciens de la Rhénanie et de la Ruhr

 

 

b) maquette de sculpteur

 

Amiens maquette
Amiens (Somme), maquette du monument aux morts
par le sculpteur Albert Roze (1861-1952)

 

Amiens mam (2)
Amiens (Somme), monument aux morts,
Albert Roze, sculpteur

 

Amiens mam (1)
Amiens (Somme), monument aux morts


La mention "del et sculp" qui suit le nom d'Albert Roze est l'abréviation des mots latins : delineavit et sculpsit. Ils signifient : "a dessiné et a sculpté".

 

Auffay projet statue
Auffay (Seine-Maritime), mauqette du monument aux morts
par l'architecte Lelong et le statuaire Guilloux

 

c) le choix du jury

 

Saint-Chamond jury MAM 14 janv 1922
Saint-Chamond (Loire), procès-verbal de la réunion du Jury
chargé de l'examen des projets de monument, 14 janvier 1922
(source : archives municipales)

 

d) la mise au point de la liste des noms à inscrire sur le monument

 

Saint-Chamond affiche liste des noms
Saint-Chamond (Loire), affiche appelant les familles
à venir rectifier ou compléter les renseignements relatifs
aux noms des soldats à inscrire sur le monument aux morts
,
26 mars 1923 (source : archives municipales)

 

 

4) la fabrication 

 

Une statue est coulée en fonte de fer bronzé ou en bronze ciselé patiné, beaucoup plus coûteuse.

On appelle sculpteur celui qui taille la pierre pour créer une forme unique originale. On appelle statuaire celui qui réalise un modèle en plâtre (le plus souvent) qui sera ensuite coulé en bronze ou en fonte.

La conception des monuments aux morts relève en grande partie de l'art de série. L'une des entreprises les plus connues était les Marbreries Générales Gourdon dont le catalogue a fait le tour de France.

 

Marbreries Gourdon placard publicitaire 1925
placard publicitaire des Marbreries Gourdon dans la presse, 1925

 

Le monument aux morts est un cénotaphe (du grec kenos, vide ; et taphos, tombeau) : il ne contient pas de corps et est dédié à la mémoire de ceux qu'il honore.

 

(à suivre)

 

 

5) la construction

Le monument est généralement construit sur place. Mais il arrive que la statue provienne d'ailleurs. À Rostrenen (Côtes d'Armor), la sculpture a été réalisée à Paris puis transportée par chemin de fer en janvier 1921 (voir Rostrenen).

Quand la statue choisie est celle d'une fabrication en série par la Fonderie du Val d'Osne, par exemple, elle doit cheminer par voie ferrée.

Escoublac-la-Baule devis
Escoublac-la-Baule (Loire-Atlantique), devis d'un entrepreneur en bâtiment,
19 août 1919
(source)


Ce sont les entrepreneurs locaux qui ont en charge la construction de l'édifice. Il s'agit de creuser les fondations, d'aménager un terre-plein, d'élever la base (socle, piedestal, marches...) qui portera le monument proprement dit (stèle, statue...), d'entourer le tout d'une grille et d'un portail.

 

Alençon construction
Alençon (Orne), construction du monument aux morts

 

Saint-Christophe-le-Jajolet construction
Saint-Christope-en-Jajolet (Orne), construction
du monument aux morts
 

 

Charentenay construction
Charentenay (Yonne), monument aux morts en construction

 

Combles Somme construction
Combles (Somme), monument aux morts en construction

 

lieu inconnu construction
lieu inconnu, ouvriers sur les échaffaudages de construction
du monument aux morts

 

 

6) l'inauguration

 

a) cérémonies précédant l'inauguration

Les municipalités n'ont pas attendu la construction du monument aux morts pour honorer les soldats disparus à la guerre. Des célébrations furent organisées, parfois durant la guerre elle-même comme à Étrepilly (Seine-et-Marne) le 10 septembre 1916 ; ou après la fin des hostilités tant que le monument n'était pas érigé.

- pendant la guerre

 

Étrepilly 10 sept 1916
Étrepilly (Seine-et-Marne), le 10 septembre 1916, cérémonie à la mémoire
des soldats tombés lors de la bataille de la Marne du 5 au 10 septembre 1914
(source)

 

- après la guerre

 

Saint-Chamond manifestation oct 1919
Saint-Chamond (Loire), manifestation du 2 novembre 1919
(alors que le monument ne fut construit et inauguré qu'en 1923)

 

 

 

b) l'inauguration officielle

La manifestation publique proprement dite est, dans de nombreux cas, le second moment de la cérémonie. Celle-ci commence par la bénédiction du monument, à l'église ou dehors, par le prêtre ou l'évêque dans les grandes villes.

 

 

Elliant (Finistère) inauguration
Elliant (Finistère), programme des fêtes d'inauguration du monument aux morts,
31 juillet et 1er août 1921 (source)

 

 

 

 

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